Chapitre 7 - Confidence

Chapitre 7 desideria

 

Le lendemain Desideria repartit travailler à la bibliothèque. Cette nuit troublante ne l’avait pas reposée. Lysias remarqua qu’elle était déjà fatiguée et il s’en inquiétait. La demoiselle se contenta de lui dire qu’elle n’avait pas trouvé le sommeil. Elle se dirigea vers le vestiaire et déposa son sac. Ensuite elle partit faire ses tâches quotidiennes. Bien qu’il y ait régulièrement du va-et-vient avec les adhérents, la bibliothèque restait assez calme. Desideria ramassa les ouvrages abandonnés sur les tables pour les ranger dans les étagères. Puis l’ouverture de la porte principale retint machinalement son attention. Elle se mit à rougir lorsqu’elle vit Camus avec un livre dans la main. Le visiteur se rendit bien compte de sa gêne. Elle se cacha discrètement derrière une étagère. Lysias l'accueillit avec sa bonne humeur.

 

« Ah bonjour Camus, comment vas-tu ?

— Juste un peu fatigué mais ça va.

— Oh, toi aussi ? Desideria c'est pareil, elle n’a pas su dormir.

— Tiens donc, fit le jeune homme en arquant un sourcil.

— Tu ramènes déjà ce livre ? Mais tu l’as pris il y a tout juste quelques jours.

— Fini. En même temps vu la nuit que j’ai passé, je n’avais plus que ça à faire.

La demoiselle s’éloigna silencieusement. Elle s’en voulait de l’avoir réveillé. Cependant elle espérait qu’il ne viendrait pas lui demander des comptes. Que pourrait-elle bien lui dire ?

— Bon. Je vais mettre à jour mon fichier. Tu peux le poser sur le comptoir. Tu en prends un autre ?

— Oui je vais voir ce que je peux trouver.

Il balaya la pièce du regard. La demoiselle n’est pas à l’horizon, comme par hasard, pensa-t-il. Le grand homme parcourut les rayonnages à la recherche non pas d’un livre mais de la jeune femme qui avait troublé son sommeil. Où se cachait-elle ?

— Desideria ! appela Lysias. Tu peux me ranger ce livre s’il te plaît ? (Seulement la jeune femme ne pointait pas le bout de son nez.) Desideria ? Mais où est-elle passée ? (Lysias tenta de la trouver pendant que le Verseau arborait un petit sourire.) Tu n’as pas vu Desideria, Camus ?

— Non, pourtant j’aimerais la voir si c’est possible.

— Oh bien sûr que c’est possible. Elle est peut-être partie aux toilettes. Je vais voir si je peux te la trouver.

— Merci Lysias, je l’attends.

Le vieil homme parcourut les couloirs jusqu’aux toilettes. Il frappa à la porte seulement aucune réponse. « Desideria ? Tu as un souci ? » s’inquiéta-t-il. Il joua avec la poignée et elle s’ouvrit aisément. La jeune femme n’était pas aux toilettes. Cela le rassurait car il l'imaginait déjà avoir fait un malaise dedans. Il retourna dans les rayonnages et vit Camus qui la cherchait. « Elle est peut-être à l’étage ? » dit-il. Il monta les escaliers suivit par le chevalier. « Desideria ! » cria le gérant. « Oups ! » fit-elle en faisant tomber un livre.

— Je suis ici ! fit-elle du haut de son échelle.

— Ah tu pourrais répondre. On te cherche depuis tout à l’heure.

— Pardon, je ne vous avais pas entendu.

— Pourtant la bibliothèque n’est pas si grande, affirma Camus. Serais-tu devenue sourde ?

— Euh, je lisais un résumé, mentit-elle, je n’ai pas fait attention.

— Veux-tu bien descendre ? Camus voulait te voir, je vous laisse discuter tranquillement.

— Euh, oui bien sûr.

La demoiselle regardait le vieil homme s’éloigner, le mal-être s’installa en elle. Elle voulait voir Camus de plus près mais pas dans de telles circonstances. Sans doute allait-il lui poser des questions sur cette nuit. Milo l’avait balancé, c’est certain ! Maudit soit-il ! Elle descendit doucement de l’échelle, elle sentit des fourmis parcourir ses jambes. Camus ramassa le livre qu’elle avait fait tomber. « Cette femme s’intéresse aux lois de la physique ? Depuis quand ? » se demandait-il. Il la verrait plus facilement lire des romances vu son côté fleur bleue. Elle arriva en bas de l’échelle. La pauvre était tellement pétrifiée qu’aucune parole ne sortait de sa bouche ; pas même la formule usuelle « en quoi puis-je vous aider ? » Non, là elle avait trop peur. Elle s’appuya contre le bois de l’étagère car elle se sentait faiblir. Il était là en train de la scruter avec un regard inexpressif. Quelles pensées lui traversaient l’esprit en ce moment ?

— Vous n’avez pas l’air de vous sentir bien, remarqua le chevalier en lui tendant le livre. (Elle le reprit mais n’osa répondre quoi que ce soit. Elle s’était contentée d’acquiescer en signe de remerciement.) « Elle est facilement impressionnable » pensa-t-il. Bon je n’irai pas par quatre chemins. (Elle garda les yeux baissés, elle savait pertinemment ce qu’il allait lui dire.) Il y avait une femme dans ma chambre cette nuit. C’était vous ? (Elle se contenta d’acquiescer à nouveau timidement. Nier ne servait à rien.) Je pourrais savoir ce que vous faisiez là ?

— C’est le chevalier du Scorpion qui vous l’a dit, c’est ça ?

— Le « chevalier du Scorpion » s’appelle Milo et il n’a pas eu besoin de me le dire. D’ailleurs, je le soupçonne même de vous avoir aidé à vous cacher. Vous vous êtes trahie lors de mon arrivée. (Elle resta muette.) Alors ? insista-t-il. (Il ignorait donc ce qui la tourmentait depuis quelques temps. Milo n’avait effectivement rien dit.) Desideria, regardez-moi quand je vous parle. (Elle tenta d’affronter son regard accusateur, elle en avait les larmes aux yeux.) Dites-moi simplement pourquoi vous vous trouviez-là. Je n’ai pas l’intention de vous punir pour ça.

— Au départ je ne comptais monter dans votre chambre. Je voulais voir le Grand Pope, expliqua-t-elle en retenant ses larmes.

— Pourquoi ?

— Je me suis sauvée à toute hâte, je n’ai pas réfléchi.

— Que cherchiez-vous à fuir comme ça ? Quelqu’un vous menace ou vous harcèle ?

— Non ! Enfin oui, non.

— Bon, oui ou non ?

— Ce n’est pas quelqu’un mais quelque chose. Il y a un orbe chez moi.

— Un orbe ? Vous croyez aux fantômes ?

— Je les vois alors je ne peux qu’y croire.

— Voilà autre chose, pensa-t-il. Donc vous vouliez voir le Grand Pope et vous vous êtes retrouvée dans ma chambre ?

— Je me suis arrêtée devant votre temple parce que j’étais fatiguée. Mais j’avais cru voir cet orbe qui me suivait alors je me suis cachée chez vous.

— Hum, évidemment.

— Je suis désolée d’être entrée comme ça mais cette chose me fait peur.

— Il n’y a pas de fantôme au sanctuaire. Je suppose que votre imagination vous joue des tours.

Cette remarque indigna la jeune femme. Elle voyait que Camus ne la prenait pas du tout au sérieux.

— Mon imagination ?! Vous croyez que je vous fais un caprice d’enfant ?! Vous êtes tous bien dans vos temples, et les autres dans leur maison près du sanctuaire ! Eux se sentent bien en sécurité ! Mais moi je vis toute seule dans une maison isolée loin des autres ! Je pourrais être tuée que vous ne le sauriez même pas ! Alors oui la nuit je ne suis pas du tout rassurée.

— Elle s’énerve vite malgré son tempérament calme, songea-t-il. Il est vrai que votre maison est assez éloignée. Les gardes ne vous ont pas vu fuir ?

— Je n’ai rencontré personne sur ma route. Et de toute façon qu’est-ce que j’aurais pu leur dire ? Vous-même vous ne me croyez pas.

— Je ne crois surtout pas aux fantômes. Vous ne pouvez pas vous introduire dans les temples comme ça. Je vais voir avec le Grand Pope ce qu’on peut faire. »

 

Il y avait bien quelques temples vides mais la faire loger en ces lieux serait beaucoup trop dangereux pour elle. Elle pourrait peut-être vivre avec un des chevaliers d’argent. Misty peut-être ou Astérion ? Un autre chevalier ne serait pas d’accord étant donné qu’elle ne connaît que très peu de monde. Camus la salua et s’en alla vers le temple du chef. « Oh, tu ne prends pas de livre Camus ? » questionna Lysias. Le jeune homme lui répondit simplement « la prochaine fois ». Arrivé au temple, il posa le genou à terre devant son supérieur assit sur son trône. Il lui expliqua brièvement la situation.

 

« Alors elle voit les morts.

— Cela ne fait pas d’elle une nécromancienne.

— Non, évidemment. De plus si elle a peur d’un simple fantôme, je ne l’imagine pas réveiller des morts. « Donc tu n’as rien à craindre d’elle. Héberge-là ailleurs que dans ce sinistre endroit. Cette maison est froide. Desideria est isolée de tous, cela lui ferait du bien d’améliorer ses relations et de penser à autre chose que ce fantôme » lui dit l’autre. Je veux bien la reloger mais le problème est de savoir où. Peut-être pourrais-tu la prendre avec toi ? Elle serait rassurée de t’avoir près d’elle.

— Grand Pope, vous n’y songez pas ! Nous sommes les gardiens des temples, nous les protégeons des ennemis avant qu’ils n’atteignent celui d’Athéna. La loger chez moi serait trop dangereux pour elle ! Je pense qu’il faudrait réorganiser les équipes de nuit. Les gardes ne l’ont même pas vu fuir.

— Je suis certain qu’elle serait ravie de vivre avec toi, Camus.

— Et où dormirait-elle ? Dans mon lit ? Hors de question !

— Tu ne la trouves pas mignonne ?

— Là n’est pas la question. Vous me chassez de mon lit pour y mettre une femme. D’abord je ne suis pas d’accord avec cette idée ; ensuite si vous voulez vraiment la loger dans un des temples, certains sont vides de locataire.

— Je pensais plutôt que tu dormirais avec elle dans ton lit, s’amusa le Grand Pope.

— Mais je la connais à peine ! Elle peut aller au temple du Bélier, celui de la Balance ou du Sagittaire.

— Très bien, Sagittaire.

— Évidemment le plus proche du mien.

— Il n’est pas impossible que Mû et Dohko reviennent dans leur temple. J’aimerais beaucoup qu’ils reviennent en bons chevaliers qu’ils sont. Malheureusement ce ne sera pas le cas pour le Sagittaire. Cette demoiselle a besoin d’une résidence fixe.

— Elle peut vivre chez un chevalier d’argent.

— Et qui donc ? Misty ? D’après Astérion, il lui fait peur plutôt qu’autre chose. De toute manière je vais avoir besoin des chevaliers d’argent. Une fillette se fait passer pour Athena et a retourné les chevaliers de bronze contre nous. Je ne peux pas laisser faire ça ! Qu’on emmène Desideria dans le temple du Sagittaire. (Le chevalier fit un signe d’approbation puis il se releva pour se retirer.) Camus ! (Le jeune homme s’arrêta.) Protège Desideria. Ce n’est pas normal qu’elle voit des fantômes. J’espère que ce n’est pas un mauvais présage pour nous. »

 

Le chevalier acquiesça puis se retira. La protéger pouvait faire partie de ses missions. Néanmoins Camus était agacé par le comportement de certains. D’abord Milo et maintenant le Grand Pope qui veut lui mettre cette fille dans les bras. Des sentiments, cela ne se commande pas ! De plus si elle éprouvait vraiment quelque chose pour lui, ce ne serait pas lui rendre service. Milo dirait sûrement que c’est parce qu’il la connaissait peu. À quoi bon s’attacher ? Être la femme d’un chevalier, c’était prendre le risque de devenir veuve assez tôt. Camus ne voulait pas la faire souffrir autant.

Date de dernière mise à jour : 2020-08-17

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