Chapitre 12 - Mauvaises nouvelles

Chapitre 24

Le soir s'installa immanquablement. Camus revint au temple avec sa protégée. Elle avait déjà mis sa nuisette mais n’osait pas entrer dans le lit tant qu’il ne l’avait pas invité. « Tu ne vas pas dormir debout tout de même ? » lui avait-il demandé assis sur le lit. Desideria se coucha en frissonnant du côté gauche, lui du côté droit. La nuit devenait de plus en plus fraîche et il n’y avait qu’un drap, pas de couverture ni couette. Droite comme un I, elle n’osait plus bouger alors qu’elle tremblait légèrement. Elle tentait de ne pas le montrer. Aussi, il était torse nu, de quoi faire emballer le cœur de la jeune femme. Peut-être que si elle se mettait sur son côté gauche elle aurait moins froid. En fait, elle voulait éviter de lorgner sur lui et de le gêner. Il était allongé à côté d’elle, regardant en face de lui. « Elle est fort éloignée. N’osera-t-elle pas se rapprocher ? » Il tourna la tête vers elle et la vit de dos. « Elle a froid » constata-t-il. Il s’approcha doucement d’elle pour ne pas la surprendre. Il l’enlaça puis la cala contre lui. Elle comprit vite pourquoi il n’avait pas besoin de couverture. Sous ses airs froids c’était un radiateur ambulant ! Cependant cela lui faisait beaucoup de bien d’être réchauffée. Elle arrêta de trembloter et se laissa même aller contre lui, puis ils s’endormirent profondément.

 

Plus tard lors d’une belle matinée, Desideria se préparait à la salle de bain. Elle se lava et releva ses cheveux avec une pince avant de se maquiller. Elle devait s'en aller travailler. Camus était déjà parti. Il se levait tôt par rapport à elle. La jeune femme descendait les escaliers. Il faisait frais néanmoins c’était supportable. Les rayons du soleil réchaufferont l’atmosphère au fur et à mesure. En arrivant elle salua Lysias qui présentait quelques signes de faiblesse. Ceci inquiéta beaucoup la demoiselle.

 

« Lysias, vous devriez aller vous reposer.

— Ne t’en fais pas Desideria. La douleur va partir.

— Où avez-vous mal ? Dans la poitrine ?

— Oui, mais ne t’inquiète pas, ça va aller. Je me sens déjà mieux.

— Non, non ça ne va pas aller. Ça fait combien de temps que vous avez des douleurs comme ça ?

— Depuis un moment, mais on s’y fait.

— Vous exagérez Lysias ! Vous êtes allé voir un médecin au moins ?!

— Mais non, tu t’inquiètes trop. Ce ne sont que des douleurs de vieux.

— Vous plaisantez j’espère ! Elle se dirigea vers la porte d’entrée.

— Où est-ce que tu vas ?

— J’arrive, je vais à l’infirmerie.

— Tu as un problème toi aussi ? Tu peux prendre ta journée si tu en as besoin.

La jeune femme leva les yeux au ciel. C’est plutôt lui qui devrait prendre sa journée. À peine fut-elle sortie du bâtiment qu’elle tomba sur le Grand Pope.

— Bonjour Desideria.

— Bonjour Grand Pope.

Elle passa sur le côté pour se rendre à l’infirmerie.

— C’est tout ce que tu as à me dire ? Je te trouve vraiment très jolie, encore plus depuis que tu vis chez Camus.

— Grand Pope, je suis navrée mais je ne suis pas d’humeur à vous supporter !

— Où vas-tu comme ça ?!

— À l’infirmerie !

Elle s’éloigna tandis que le chef resta bouche-bée.

— « Me supporter » ?

— Ne t’énerve pas, fit Saga. Elle a l’air préoccupée. Quelque chose ne va pas.

— Ce n’est pas une raison pour me manquer de respect !

— Il y a longtemps que tu as perdu son respect. Tu devrais la laisser tranquille. Milo te regarde d’un drôle d’œil, il veille sur elle. Si tu tentes quoi que ce soit, il n’hésitera pas à venir la secourir. D’ailleurs il est possible qu’on te demande pourquoi tu es allé la voir.

— Je ne peux pas simplement lui dire bonjour, comme n’importe qui d’autre ?

— Sauf que tu es le Grand Pope qui a voulu la coincer dans les rochers.

— Mouais. J’avais quelque chose de pas très joyeux à lui annoncer. Tiens ? Elle ressort de l’infirmerie.

La demoiselle s’avança vers le chef pour rejoindre la bibliothèque.

— Vous êtes encore là ? Vous m’attendiez ou quoi ?

— Oui. J’ai une annonce à te faire. Cela enlèvera une épine du pied à tes chers amis. Je jouerai le rôle de porteur de mauvaises nouvelles pour eux.

Elle afficha un air inquiet.

— « De mauvaises nouvelles » ? C’est-à-dire ?

— Je sais que tu côtoyais beaucoup Misty et Astérion.

— Vous allez me le reprocher ?

— Non, bien sûr que non. (Il hésita quelques secondes.) Desi’, je suis désolé mais tu ne les reverras plus jamais.

Elle écarquilla les yeux avec stupeur.

— Quoi ?! Comment ça ?

— Ils ont été assassinés par les chevaliers de bronze, les rebelles. (Les jambes en coton Desideria finit par s’effondrer. Les larmes lui vinrent aussitôt aux yeux et son visage se mit à rougir. Le chevalier du scorpion s’avança rapidement. Elle plaqua ses mains sur son minois pour cacher sa détresse. Le Grand Pope s’abaissa à son niveau et posa sa main sur son épaule.) Je suis navré Desi’ de te l’annoncer ainsi. Je suis moi-même chagriné par leur perte.

— Qu’est-ce qui se passe ? demanda Milo. Que lui avez-vous encore fait ?!

— Je ne lui ai rien fait, répondit le Grand Pope d’un ton sec. Je lui ai juste annoncé la mort de ses amis. Il fallait bien que quelqu’un le fasse, non ? (Il se releva en toisant Milo.) Et je te rappelle que ce n’est pas une façon de parler au Grand Pope ! Je peux comprendre que tu veuilles protéger la copine de ton ami. Mais je suis votre chef, le représentant d’Athéna ! D’ailleurs j’aimerais te voir au plus tôt au palais Milo. J’ai une mission importante à te confier.

— Je vais rester un peu avec elle. Je vous rejoins dès qu’elle se sentira mieux.

— Parfait. Je t’attendrai à la salle du trône.

Le Grand Pope retourna à son palais en ruminant discrètement.

— Ça va aller Desi’ ?

— C’est vrai ce qu’il dit ? Misty et Astérion sont morts ?

— Malheureusement oui. On nous a ramené leurs corps, on les enterre actuellement.

— Je dois aller au cimetière.

— Non pas maintenant. Tu revenais de l’infirmerie. Est-ce que tu te sens bien ?

— Je suis juste un peu bouleversée. Milo, je suis inquiète pour Lysias. Il se plaint de douleurs dans la poitrine. Je viens de prendre rendez-vous avec le médecin, il faut qu’il l’examine.

— Alors prends soin de lui au lieu de te précipiter au cimetière. Tu te rendras bien plus utile ainsi. »

 

La jeune femme approuva. Lysias aura besoin de son soutien. Et même s’il fait sa tête de mule pour aller voir le médecin, elle le traînera à son cabinet. « Alors comme ça on ne veut pas se soigner ?! » se disait-elle. Néanmoins elle ne l’entendait pas de cette oreille. Seulement cela sera difficile d'occuper son esprit tout le long de la journée. Elle aura quand même une pensée pour Misty et Astérion. Deux jours plus tard, le gérant se retrouva dans la salle d’attente avec Desideria à ses côtés. Milo avait dû partir pour l’île d’Andromède sur les ordres du Grand Pope. L’esprit était là aussi, restant près de la jeune femme afin de la soutenir. Alors qu’ils attendaient dans la pièce, elle repensait à cette nuit passée auprès de Camus. Chaque nuit elle dormait dans ses bras. Elle s’y sentait si bien, en sécurité cette fois. Elle ne craignait plus rien la nuit. Soudain la porte s’ouvrit et le médecin appela Lysias. Elle l’accompagna dans le cabinet et ils s’assirent devant le bureau. Le docteur posa plusieurs questions au patient, puis selon les réponses obtenues il décida de lui faire passer quelques examens. Il rédigea un courrier qu’il remit au vieil homme avant de prendre congé. Lorsqu’il fut sorti, Lysias n’hésita pas à pester.

 

« Me voilà avec une batterie d’examens à faire maintenant ! Qui va s’occuper de la bibliothèque pendant ce temps ?

— On peut fermer le bâtiment pendant quelques heures. Il suffit de mettre un message sur la porte, les gens comprendront.

— Tu exagères. Ça fait un moment que je ressens ces douleurs et je n’en suis pas mort !

— Jusqu’au jour où ça arrivera. Si vous partez, qu’est-ce qui se passera pour votre bibliothèque ? Elle sera fermée définitivement ! Si vous voulez qu’elle reste ouverte, il faut vous soigner !

— Bon, bon. Je vois que je n’aurai pas le dernier mot avec toi.

— C’est pour votre bien, Lysias. »

 

La demoiselle n’avait pas l’intention de le lâcher aussi facilement. Il était têtu mais elle aussi. Elle comprenait que la bibliothèque avait de l'importance pour lui, seulement ce n’était pas une raison pour négliger sa santé. Lors de la pause-déjeuner, la jeune femme se dirigea vers le réfectoire. Au loin elle vit le Grand Pope. Décidément il était là en permanence et il s’arrangeait toujours pour être bien visible. Que cherchait-il à faire ? Sûrement rester dans son esprit le plus longtemps possible. Dans quel but ? Elle l’ignorait. Tentative d’intimidation ? Cela pourrait bien aller avec son profil. Camus la tira de ses songes et l’invita à entrer dans l'établissement. Elle le suivit et pendant le repas elle lui confia ses inquiétudes pour son patron. Lysias n’avait parlé de ses douleurs à personne. Et il avait toujours fait en sorte de ne pas le montrer. C’était un homme très pudique et qui parlait peu au final. Rendre service, guider quelqu’un vers le bon livre, cela lui allait bien. Toutefois pour ce qui était de parler de soi il mettait plus de réserve. Desideria redoutait le pire. L’autre fois le gérant avait l’air d’avoir très mal à la poitrine. Et cela ne l’étonnerait pas s’il avait des douleurs dans le bras gauche. Depuis combien de temps ? Même au médecin il n’avait su le dire. C’était très préoccupant. Camus lui répondit qu’elle faisait bien de veiller sur lui. Non pas qu'il se désintéressait du cas de Lysias mais elle était son principal contact. L’avantage qu’elle avait, c’était que la bibliothèque se situait près de l’infirmerie, elle pouvait donc vite appeler du secours en cas de problème.

 

L’après-midi la jeune femme se dirigea vers le cimetière. Elle avait encore du mal à réaliser qu’elle se trouvait devant la tombe d’Astérion et de celle de Misty. Elle resta silencieuse devant les pierres tombales. Néanmoins on voyait bien une profonde tristesse sur son visage. Elle ressentit un énorme vide. Le blondinet ne sera plus là pour la taquiner ou l’inciter à entrer au conservatoire. Astérion aussi était un homme sympathique lorsqu'on le connaissait bien. L’esprit se posa sur son épaule, comme quelqu’un qui aurait posé sa main pour la réconforter. Puis elle sentit une masse sur cette même épaule, alors elle se tourna et vit Argol. Elle eut un mouvement de recul ; plus par surprise que par crainte. « Ils te manquent aussi ? La jeune femme acquiesça lentement et en baissant les yeux. À nous aussi. Une larme coula sur la joue de la demoiselle. Il la serra contre lui pour apaiser sa peine mais elle éclata en sanglots. Je te jure que leurs assassins paieront pour leurs crimes. »

Date de dernière mise à jour : 2020-08-17

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